Un amour fragile

Convictions et étapes de la conversion dans la spiritualité zundélienne

 

3e article d’une série de 8 sur les principales convictions et les étapes de la conversion selon l’itinéraire zundédien. Troisième conviction qui oriente la spiritualité zundélienne : un amour fragile.

Merci de vous référer au premier article de cette série afin de situer le présent article dans son ensemble.


Un amour qui s’expose à nos refus

Le Dieu intérieur qui n’est qu’Amour est par conséquent un amour fragile.

« Dieu se propose toujours, mais ne s’impose jamais ». (Maurice Zundel)

Ainsi en est-il de l’amour.

L’Amour s’expose donc à nos refus et Maurice Zundel insiste sur le fait qu’il est souvent refusé.

Notre refus de Son Amour est à l’origine de la souffrance de Dieu de même que de la dégradation de l’être humain et de sa déshumanisation.

C’est le sens de la crucifixion qui n’est pas pour Zundel uniquement un événement situé dans le temps, mais l’événement qui est signe de ce que vit Dieu dans son intimité.

Blaise Pascal avait dit :

« Jésus sera en agonie jusqu’à la fin de monde. Il ne faut pas dormir pendant ce temps-là. »

Sur le chemin de Damas, saint Paul fit la rencontre du Ressuscité qui lui dit :

« Saul, Saul, pourquoi me persécuter? » (Ac 9,4b)

L’amour créateur est aussi un amour souffrant

L’amour de Dieu est fragile comme peut l’être tout ce qui est précieux : la vérité, la beauté, l’amitié et l’amour.

Autant de réalités que l’on ne peut imposer.

Dire que l’amour de Dieu est un amour souffrant, c’est reconnaître qu’il s’agit d’un amour qui choisit comme seule manière de surmonter nos refus que de nous aimer toujours davantage, jusqu’au bout, en donnant sa vie pour nous :

« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » (Jn 15,13)

Celui qui est capable du plus grand amour est capable de la plus grande joie, du plus grand bonheur, comme de la plus grande souffrance.

C’est pourquoi Zundel n’hésitera pas à affirmer que l’amour créateur est aussi un amour souffrant et un amour crucifié :

« La Croix est l’expression de toute la Trinité, comme elle nous ramène à toute la Trinité, à cet Amour où, éternellement, circulent la Lumière et la tendresse sans retour.

La Croix exprime tout cela et que Dieu s’identifie avec nous et que sa mort est une mort d’identification avec nous pour nous arracher à la mort et faire de nous tous des créateurs, des sources de vie, pour faire de chacun de nous un espace et une valeur, un don.

Dieu souffre, il est victime, il meurt, il est crucifié, condamné, rejeté et comment mieux révéler la grandeur de la liberté humaine?

Dieu sur la Croix est infiniment désarmé, ne pouvant rien dans le monde et dans la Croix sans le consentement de notre amour parce que la Croix est une histoire d’amour.

Il y a donc infiniment plus de douleur en Dieu que dans toutes les morts, dans toutes les douleurs. Il y a infiniment plus de douleur en Dieu qu’en nous. C’est une douleur virginale, dépossédée, d’identification. C’est l’Amour qui vit notre joie et notre douleur avec le même degré et la même plénitude. »

Maurice Zundel (Tiré de La douleur divine, Le Caire, 22 mai 1961)