Notre-Dame de Pellevoisin

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... et la propagation de la dévotion au divin Cœur de Jésus

Dans les deux derniers siècles de l’histoire de l’Église, les apparitions de la Vierge Marie se sont multipliées. S’ensuit le plus souvent l’édification de sanctuaires appropriés sur les lieux où Marie s’est fait connaître, suivie de nombreux pèlerinages.

L’exemple de Lourdes (1858) est sans doute le plus connu de nous, mais il y en a d’autres : La Salette (1846), Pontmain (1871), Pellevoisin (1876) en France, Fatima (1917) au Portugal, Beauraing (1932) et Banneux (1933) en Belgique et Medjugorje (1981) en Bosnie-Herzégovine. Pour tout dire, Marie s’est manifestée un peu partout dans le monde, y compris en Amérique, en Afrique et en Extrême-Orient.

Les Clercs de Saint-Viateur et Notre-Dame de Pellevoisin

Notre-Dame de PellevoisinAu Canada, en 1897, la ville de Joliette célébrait avec éclat les 50 ans de l’arrivée des Clercs de Saint-Viateur au pays. Le P. Pascal Lajoie, supérieur général de la congrégation, profite de l’occasion de sa visite canonique au Canada et aux États-Unis pour se joindre aux célébrations du 23 juin.

Il le fait avec d’autant plus de cœur qu’il a été curé de Joliette de 1864 à 1880, et curé très apprécié. Il est accompagné d’un confrère français, le F. Onésime Guillermain, fervent promoteur des apparitions de la Vierge à Pellevoisin (1876), un coin de l’archidiocèse de Bourges. Grâce à ce confrère, Pellevoisin ne nous est pas tout à fait inconnue.

Le 2 septembre, à notre nouvelle Maison provinciale d’Outremont, le même P. Lajoie bénit la première statue de Notre-Dame de Pellevoisin à nous parvenir de France. C’est cette même statue qui a orné jusqu’à l’an dernier le chœur de la chapelle dite « du Vœu », inaugurée le 16 juillet 1948 dans le même édifice en reconnaissance à Marie qui, en bonne Mère, a permis à notre communauté de survivre aux horreurs de son crash financier de 1904 à 1911. Mais de quoi s’agit-il quand on parle de Notre-Dame de Pellevoisin?

Une apparition de la Mère de Miséricorde au beau milieu de la France

Il faut d’abord dire que Pellevoisin est une paroisse du diocèse de Bourges situé au beau milieu de la France dans le département de l’Indre près de Châteauroux. C’est dans ce bourg établi à une croisée de chemins qu’Estelle Faguette, une domestique de 32 ans, à l’article de la mort, dans la nuit du 14 février 1876, reçoit la visite de la Vierge Marie, Mère de Miséricorde.

Cette apparition s’est répétée dans son sommeil à quinze reprises jusqu’au 8 décembre de la même année et elle fut l’occasion, à la cinquième apparition, celle du 19 février, de la parfaite guérison de la mourante.

Estelle FaguetteCette série d’apparitions est suivie de proche par l’abbé Salmon, curé de Pellevoisin, qu’elle s’est choisie comme accompagnateur spirituel. Elle l’informe au jour le jour du moindre détail des apparitions, mais ce qu’elle rapporte n’affecte en rien le scepticisme du bon prêtre qui trouve que, vu son état de santé, il est normal qu’elle déraille quelque peu.

Surtout à la troisième apparition, quand elle l’informe que Marie lui a promis la guérison pour le surlendemain. Or, au jour dit, l’abbé est obligé de se rendre à l’évidence : il la trouve toute ragaillardie – de corps, de cœur, d’âme et d’esprit. « Vive Jésus dans nos cœurs! »

Mais ce n’est pas tout, à la neuvième apparition, celle du 9 septembre, la miraculée reçoit de Marie une mission spéciale, celle de propager la dévotion au divin Cœur de Jésus par le moyen du scapulaire du Sacré-Cœur, dévotion bientôt encouragée par l’archevêché, puis approuvée par Rome sous Léon XIII en 1900.

Estelle Faguette

Mais qui était Estelle Faguette? Notons d’abord qu’elle est née dans une région de France plus au nord, à Saint-Memmie en Champagne le 12 septembre 1843 de parents croyants et financièrement à l’aise. Désirant consacrer sa vie au service des nécessiteux, elle entre à 20 ans chez les Augustines hospitalières de l’Hôtel-Dieu de Paris, mais une chute accidentelle dans un escalier fait d’elle une handicapée, ce qui l’oblige à renoncer à la vie religieuse.

Sanctuaire de PellevoisinElle devient, en dépit de ses difficultés, femme de chambre de la comtesse de La Rochefoucauld à Paris comme au château de Montbel, près de Pellevoisin. Plus tard, elle fait venir près d’elle ses parents ruinés par un mauvais tournant de leurs entreprises. Elle s’engage à les soutenir du mieux qu’elle peut malgré son peu de ressources.

Puis voilà qu’à 32 ans, après douze ans de bons services à sa maîtresse, elle est atteinte d’un mal incurable qui affecte douloureusement son estomac, ses poumons en plus de son genou de nouveau endolori. Les médecins consultés ne voient pas comment elle pourrait s’en tirer.

C’est alors qu’elle écrit à la Vierge Marie pour obtenir sa guérison :

« Accordez-moi donc, de votre divin Fils, la santé de mon pauvre corps pour sa gloire. Regardez donc la douleur de mes parents : vous savez bien qu’ils n’ont que moi pour ressources ».

Incapable de se déplacer, elle demande à une amie d’insérer le message dans la grotte de Notre-Dame-de-Lourdes édifiée dans le parc du château des La Rochefoucauld à Montbel. Sa situation allant se dégradant, elle rejoint ses parents installés par la comtesse dans une maison près d’une église à Pellevoisin. C’est alitée dans cette maison qu’elle reçoit la visite de Marie le 14 février 1876 et qu’elle se voit guérie de son mal à la cinquième apparition, celle du 19 février.

Notre-Dame de Pellevoisin

Vitrail de l'église de NangisQuinze jours après les apparitions, l’archevêque de Bourges, à la demande de la comtesse, autorise la transformation de la chambre des apparitions en oratoire privé et permet qu’on l’orne de la statue de Notre-Dame de Miséricorde, madone déjà honorée dans le diocèse, devenue, pour ainsi dire, Notre-Dame de Pellevoisin. On ajoutera, pendu à son cou, un scapulaire du Sacré-Cœur, rappel ressenti du message du 9 septembre.

Des pèlerinages seront bientôt organisés, souvent présidés par des évêques; une archiconfrérie du Sacré-Cœur sera aussi créée. À défaut de pouvoir construire un sanctuaire dans l’immédiat, les visiteurs sont invités à fréquenter, tout près, l’église dédiée aux apôtres Pierre et Paul.

Dix ans plus tard, la chapelle s’agrandit d’une partie du rez-de-chaussée de la sainte maison tandis que la chambre des apparitions en devient le chœur. Puis, pour animer le milieu, la comtesse et les religieuses dominicaines construisent un couvent accolé à la maison.

On en profite pour tirer des plans pour le futur sanctuaire, ce qu’on n’a pu réaliser depuis faute de moyens. En 1998, les Sœurs contemplatives de la Communauté de Saint-Jean ont pris la relève des Dominicaines et poursuivent l’animation du « sanctuaire ».

La cause de la béatification d’Estelle la miraculée

Quant à Estelle la miraculée, elle a repris son boulot au service de la comtesse, s’occupe de ses parents, vit dans la discrétion malgré les nombreux témoignages qu’elle est tenue de rendre sur ce qui s’est vraiment passé. Il lui a été donné, en outre, d’être reçue en audience par Pie X à deux reprises et aussi par Pie XI.

Elle est décédée le 23 août 1929 à l’âge de 86 ans. La cause de sa béatification vient d’être introduite au niveau diocésain par décision de la Conférence des Évêques de France le 20 juin 2020, initiative sans doute confirmée depuis par la Sacrée Congrégation pour le culte des saints. Quant à l’approbation romaine des apparitions, comme il arrive le plus souvent, elle se fait toujours attendre malgré quelques tentatives.

Avec la fermeture en 2021 de notre Maison provinciale d’Outremont et la disparition de « la chapelle du Vœu », notre statue de Notre-Dame de Pellevoisin, Vierge Mère de Miséricorde, poursuivra son règne chez nos confrères d’Haïti, à la Villa Manrèse de Port-au-Prince qu’on vient tout juste de reconstruire.

Source :
Voix du sanctuaire 2022 (PDF).

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