Tous appelés à faire sa part pour l’avènement du Royaume

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Réhabiliter la grâce du baptême (et par le fait même la « confirmation du baptême »), c’est reconnaître le rôle de l’Esprit-Saint dans la liberté et la vocation de tout chrétien à la responsabilité apostolique, chacun selon son charisme personnel. Chaque chrétien participe au sacerdoce du Christ et est donc pleinement responsable de l’avènement du Royaume de Dieu.

À partir de « Peuple de prêtres…? » de Pierre Dentin, prêtre, Éditions du Cerf, Paris, 1992, 325 p.


Une invitation qui s’adresse à tout disciple

Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création.
(Mt 16,15)

Lumière découverteVous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée.
Et l’on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau; on la met sur le lampadaire, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison.
De même, que votre lumière brille devant les hommes : alors, voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux.
(Mt 5,14-16)

En effet, le royaume des Cieux est comparable au maître d’un domaine qui sortit dès le matin afin d’embaucher des ouvriers pour sa vigne.
Allez à ma vigne, vous aussi, et je vous donnerai ce qui est juste.
(Mt 20,1.4)

Dans la pensée et la volonté de Jésus, telle qu’exprimée dans les Évangiles, l’invitation à contribuer à l’avènement du Royaume de Dieu s’adresse à tout disciple, non seulement à quelques privilégiés.

La mission est un service rendu à l’humanité et c’est le Christ qui en est l’âme :

Pour vous, ne vous faites pas donner le titre de Rabbi, car vous n’avez qu’un seul maître pour vous enseigner, et vous êtes tous frères.
Ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n’avez qu’un seul Père, celui qui est aux cieux.
Ne vous faites pas non plus donner le titre de maîtres, car vous n’avez qu’un seul maître, le Christ.
Le plus grand parmi vous sera votre serviteur.

Comme l’affirme Annie Jaubert (citée dans Jean Delumeau, Histoire vécue du peuple chrétien, Privat, 1979, p. 31) :

PêcheursQuel que soit le prestige personnel de Paul, l’on ne comprend pas l’extraordinaire diffusion du message chrétien sans cette sorte de mobilisation qu’opérait la prédication de l’Évangile avec la participation de tous.

De fait, on remarque que dans l’Église des origines il n’y avait aucun organigramme.

Ce sont les besoins de l’Église ainsi que la lecture des signes des temps qui ont favorisé la création de nouveaux ministères au service de l’évangélisation. (p. 36)

L’Esprit-Saint, âme de la vie chrétienne et de la mission

Les Actes des Apôtres nous apprennent que ce n’est qu’après l’irruption de l’Esprit de Pentecôte que ces « mauvais élèves » qu’étaient les disciples de Jésus devinrent de véritables apôtres héroïques. (p. 294)

L’Esprit-Saint, cet hôte généreux dont chaque chrétien est le Temple, est la clé de l’expansion du christianisme :

C’est l’unique et même Esprit : il distribue ses dons, comme il le veut, à chacun en particulier.
Prenons une comparaison : le corps ne fait qu’un, il a pourtant plusieurs membres; et tous les membres, malgré leur nombre, ne forment qu’un seul corps. Il en est ainsi pour le Christ.
C’est dans un unique Esprit, en effet, que nous tous, Juifs ou païens, esclaves ou hommes libres, nous avons été baptisés pour former un seul corps. Tous, nous avons été désaltérés par un unique Esprit.
(1 Co 12,11-13)

Les dons de l’Esprit, appelés « charismes », correspondent à une aptitude profonde pour le bien de tous. Ces charismes sont complémentaires et indispensables à la mission de l’Église.

Ce que chacun de vous a reçu comme don de la grâce, mettez-le au service des autres, en bons gérants de la grâce de Dieu qui est si diverse. (1 P 4,10)

La moisson est abondante et les besoins sont nombreux.

L’Esprit de Jésus appelle chaque chrétien à apporter son inestimable contribution.

Non, ce n’est pas le travail exclusif de « M. le curé »

Encore aujourd’hui, même après Vatican II, on constate que trop de chrétiens ne se sentent pas responsables, à parts égales, de la mission de l’Église.

C’est comme s’ils considéraient que l’appel de Jésus ne s’adressait qu’à des professionnels.

Il est vrai que les catholiques ont pris longtemps l’habitude du curé « bon à tout faire », tout devant transiter par le presbytère. C’était son « boulot » pensait-on, non celui des « simples chrétiens ». (p. 291)

Or, dans l’Évangile tout comme dans l’Église des origines, le « simple chrétien » est tout simplement inexistant.

Chaque chrétien appartient au corps du Christ. Il participe au sacerdoce du Christ de par son baptême et est donc pleinement responsable de l’avènement du Royaume de Dieu. (p. 195)

Il est de fait très significatif de constater que les évangiles, les actes des apôtres et les épîtres étaient destinés à des Corinthiens, Romains, Éphésiens, etc., bref, au peuple de Dieu. Il ne s’agissait pas de documents à l’usage exclusif d’un clergé.

Tout baptisé était tenu responsable de transmettre la lumière du Christ par sa parole et le témoignage de sa vie. (p. 35)

Redécouvrir l’appel et la grandeur du sacerdoce baptismal

Pierre Dentin insiste sur la nécessité de redécouvrir la grandeur du sacerdoce baptismal.

Du fait qu’il participe au sacerdoce de Jésus, tout chrétien est appelé à être lumière du monde, à diffuser, à sa manière, l’Évangile du salut, et à faire advenir le Royaume d’amour fraternel. (p. 34)

Pour vivre à la hauteur de la vocation de chrétien, une vie de prière est certes un passage obligé :

Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire.
(Jn 15,5)

Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos.
Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour votre âme.
Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger.
(Mt 11, 28-30)

Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde.
(Mt 28,20)

Réhabiliter la grâce du baptême (et par le fait même la « confirmation du baptême »), c’est reconnaître le rôle de l’Esprit-Saint dans la liberté et la vocation de tout chrétien à la responsabilité apostolique, chacun selon son charisme personnel. (p. 260)

Le temps de l’initiative et de la créativité

Les chrétiens conscients de leur dignité baptismale et qui sont à l’écoute de l’action de l’Esprit au cœur de leur vie savent qu’ils sont responsables de l’évangélisation de leur milieu. (p. 292)

Un appel qui nécessite de l’invention et de la créativité. De fait, les manières de faire d’hier ne sont pas nécessairement adaptées au monde d’aujourd’hui.

Il importe de créer un style nouveau d’existence chrétienne qui répond aux requêtes du monde contemporain. Le monde a changé. De nouvelles sensibilités sont présentes. Il y a un nouveau langage à acquérir.

Suivre Jésus dans un monde sécularisé, c’est donc nécessairement une marche tâtonnante. (p. 114)

À l’instar de tous les grands ordres religieux et de tous les grands courants de spiritualité chrétienne d’hier qui sont nés d’un appel et d’un besoin, il y a lieu d’explorer de nouvelles voies évangéliques. (p. 206-207)

En son temps, Jésus n’avait pas eu peur de remettre en question et d’innover.

Comment communiquer le message de l’Évangile et les richesses du christianisme aux jeunes et au monde de demain?

C’est en portant des questions que l’on pourra inventer de nouvelles réponses.

Comme l’affirme Pierre Dentin,

Au seuil de la « nouvelle évangélisation », nous voici paradoxalement ramenés aux conditions initiales de l’expansion du christianisme.
Après le passage de l’ancien (presbyteros) au prêtre (hiereus), nous faisons désormais le chemin en sens inverse.
Les premières communautés étaient plongées dans l’hostilité d’un monde païen; ne sommes-nous pas immergés dans une civilisation « postchrétienne » redevenue étrangère? Contemporains des premiers chrétiens, nous avons grand besoin de retrouver leur dynamisme, dans la conscience joyeuse d’être ensemble un peuple de prêtres, tous responsables du Royaume de Dieu. (p. 298)

Se connaître et se ressourcer au service de la mission

Pour les stoïciens de la Grèce antique, le « connais-toi toi-même » résumait l’ultime sagesse.

Pour nous chrétiens, il importe de connaître et de reconnaître notre caractère personnel d’être chrétien.

Quels sont les dons de l’Esprit qui sont miens? Quel est mon charisme personnel?

Mes talents comme ma contribution personnelle sont uniques.

Je suis appelé à apporter mon apport irremplaçable en réponse à un besoin particulier qui soit « dans mes cordes ».

Les dons de l’Esprit ne dispensent pas pour autant de se ressourcer sur le plan spirituel et d’acquérir un savoir-faire.

Se former au service de la mission, c’est plus qu’un besoin, c’est une nécessité. (p. 293)

Les dons de l’Esprit ne dispensent pas d’un minimum de formation théologique et spirituelle. (p. 303)

Terminons par une touche d’espérance…

Le monde n’a pas seulement besoin de justice et d’amour : il a besoin d’espérance. (…)
Le signe auquel on reconnaîtra que nous sommes des hommes neufs, des hommes d’après Pâques, c’est notre espérance, une espérance plus forte que notre inquiétude devant l’inconnu de l’histoire. (Claude Geffré, Un espace pour Dieu, Éd. du Cerf, 1979).

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